Fuites aux épreuves externes : surprenantes, vraiment ?

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Il y avait d’abord eu l’épreuve externe d’histoire du CESS, puis l’examen de sciences du CE1D. Aujourd’hui, c’est au tour de l’examen de néerlandais du CE1D d’être annulé pour cause de fuites. Ce qui nous surprend le plus, dans cette histoire, c’est qu’elle… surprenne !

En effet, ce à quoi nous assistons depuis quelques jours n’a rien d’une dérive (d’un-sys-tème-sco-laire-qui-se-rait-par-ail-leurs-glo-ba-le-ment-sain). Les fuites, et la monnaie trébuchante que certains en tireraient, selon les nouvelles du jour, sont bel et bien inhérentes au dit système.

Mais en quoi donc le système scolaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles génère-t-il de telles tricheries… et le chaos qui s’ensuit ?

Des écoles magasins à diplômes… et en concurrence

Primo, l’Ecole est généralement conçue comme un grand magasin à diplômes, où il importe aux individus de satisfaire à des examens, même de manière totalement factice, pour obtenir les papiers qui ouvrent les portes du marché de l’emploi. Plutôt que de réellement apprendre ce qui donne force pour comprendre le monde (et œuvrer collectivement à le changer, suivant la formule consacrée de l’Aped). Dans une perspective individualiste et cynique, il ne faut pas s’étonner que la fin justifie tous les moyens…

Secundo, notre système scolaire est organisé comme un quasi marché où les réseaux et les établissements sont en concurrence permanente. Pourquoi dès lors s’étonner de voir des questionnaires circuler dès réception dans les écoles, quelques jours avant l’épreuve ? Les tentatives de distorsion ne sont jamais bien loin de la concurrence, non ?

Epreuves externes : la charrue avant les boeufs

Des examens externes communs sont une bonne chose. Ils peuvent apporter de précieuses informations pour le pilotage du système scolaire dans son ensemble. Ils permettent aussi de réduire l’arbitraire du professeur correcteur ou du professeur enseignant. Ils devraient permettre également de lutter contre les écoles « à dépassement », qui interrogent leurs élèves sur des bases pédagogiques et des niveaux de matière supérieurs aux prescrits légaux, dépassement qui leur permet d' »écrémer » leur population scolaire en ne gardant que les plus « méritants ». Inutile de dire que les plus  » méritants » sont ceux qui sont coachés par leurs parents à grands coups d’aide à la maison, de stages, de séjours linguistiques et autres cours particuliers. Les parents aisés des milieux bourgeois, quoi. Il existe sur Bruxelles des écoles (à ISE élevé, évidemment…) qui pratiquent la méthode des doubles examens: une session avec le CE1D, qui assure de la réussite du premier cycle (c’est la loi…), et une session interne, plus difficile que le CE1D, qui déterminera si l’élève peut poursuivre dans l’école ou s’il lui sera fortement conseillé de poursuivre ses études sous d’autres cieux.

Encore une fois, la FWB a mis la charrue avant les boeufs : on ne peut défendre et instaurer des examens externes que si la structure scolaire assure une même chance de réussite pour tous les élèves, que si des luttes contre les discriminations sociales sont actives et donnent des résultats. En gros, que si le système scolaire est pensé et structuré pour lutter contre la ségrégation sociale et la discrimination, ce qui est l’exact contraire du système (qui semble même pensé pour obtenir l’inverse : favoriser la ségrégation et la discrimination…)

A quand l’Ecole commune qui nous libérera de tous ces calamiteux avatars ?