Décentralisation rime-t-il avec modernisation ou avec marchandisation ?
Vu depuis Paris, le débat sur la décentralisation de l'enseignement pourrait sembler n'être qu'un épisode de plus dans un feuilleton ennuyeux : tous les deux ou trois ans, un (nouveau) ministre de l'Education tente de moderniser un appareil scolaire obsolète, mais il s'oppose à des enseignants désespérément conservateurs, pour qui toute réforme - sauf toutefois l'augmentation du budget de l'Education - constitue une menace intolérable contre l'école républicaine, laïque, publique, gratuite et obligatoire.
L’évaluationnite, le malheur de l’école
Dès que l'on se permet aujourd'hui d'émettre la moindre réserve sur le développement de l'évaluation à l'école, on surprend les auditoires, on passe pour un fossile, on choque même certains spécialistes qui, prenant des airs effarouchés, assimilent cette attitude à un refus de mesurer l'effet d'une politique ou le rendement des moyens affectés. Il est vrai que le développement de certaines formes modernes d'évaluation à l'école est issu de la culture de l'entreprise et de la technocratie, et que, dans cet esprit, tout investissement doit être évalué. L'idée a séduit d'abord ceux qui, chez les décideurs, considèrent que l'école coûte cher et qu'elle est tenue à une obligation de résultats, et ceux qui, dans les corps d'inspection notamment, se piquent au jeu du technicisme pensant que c'est une voie pour redorer le blason d'une profession contestée. Comme tout concept d'origine économique, l'évaluation porte l'apparence d'une logique implacable et donc indiscutable. De là à en faire une exigence morale, il n'y a qu'un pas franchi avec aisance par les milieux influencés par le MEDEF, mais aussi par d'autres !