À partir du 9 janvier 2025, Anderlecht fera partie des 7 communes bruxelloises qui ne proposent que la voie numérique aux parents pour inscrire leur enfant dans une section maternelle ou primaire de l’enseignement communal. C’est illégal !
À Forest, Ganshoren, Jette, Molenbeek-Saint-Jean, Saint-Gilles, Uccle et maintenant Anderlecht, il n’est plus possible de téléphoner ou de se rendre sur place pour inscrire son enfant à l’école ! Désormais, il faut un ordinateur, une connexion internet, un lecteur de carte et un code PIN.
Alors que 40% des Bruxellois·es sont en situation de vulnérabilité face au numérique et que 10% sont en difficulté avec l’écrit, cette mesure est discriminante et illégale ! Et elle va aussi accentuer les inégalités sociales.
Une mesure discriminante et illégale !
La numérisation des inscriptions sans alternative va à l’encontre de l’article 24 de la Constitution belge qui assure le droit à l’instruction ainsi que la liberté de choix de l’école. Ne pas prévoir d’alternative à la digitalisation des inscriptions scolaires va à l’encontre de ces principes.
À cause de cette mesure, certains parents risquent de renoncer à inscrire leurs enfants dans l’école communale de leur choix et de les inscrire dans une école qui ne leur convient pas forcément ou qui n’est pas proche de leur domicile – particulièrement si, au moment où ils arrivent à faire la démarche, il n’y a déjà plus de place dans l’école de leur premier choix. Les parents en vulnérabilité numérique seront donc discriminés par rapport à ceux qui possèdent et maîtrisent ces outils.
L’initiative de ces 7 communes va aussi désormais à l’encontre de l’article 13 de l’Ordonnance «Bruxelles numérique», entrée en vigueur depuis février 2024 et qui oblige les autorités publiques à prévoir, pour toute procédure administrative, «a minima» un accueil physique, un service téléphonique et un contact par voie postale.
Une mesure qui accentue les inégalités sociales
Notre système scolaire fait partie de ceux où les inégalités entre écoles sont les plus criantes. En effet, selon les revenus de leur famille, les enfants se concentrent souvent dans des écoles distinctes (particulièrement à Bruxelles). Avec, pour effet, des résultats scolaires différents selon le milieu socio-économique. L’enquête annuelle en Fédération Wallonie-Bruxelles, « les Indicateurs de l’enseignement 2023 », le montre : le score moyen le plus bas pour l’épreuve du CEB est observé chez les élèves fréquentant une école dont l’indice socio-économique est faible.
Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène, mais l’absence de régulation des inscriptions est celui qui a le plus d’impact sur la «ghettoïsation» des écoles. Les parents de milieux favorisés, étant plus au fait du «marché» scolaire et des écoles «réputées», vont inscrire plus rapidement leurs enfants dans celles- ci, laissant peu de places aux élèves de milieux plus précaires. Dans ce contexte, la numérisation des inscriptions dans un système de «premier connecté, premier servi » ne peut qu’aggraver la situation, puisque les familles ayant plus de difficultés avec le numérique prendront plus de temps pour finaliser l’inscription de leur enfant et auront d’autant moins facilement accès à des écoles dites « réputées » déjà complètes.
Nos revendications
Nous ne pouvons pas nous résoudre à accepter que les enfants de parents en difficulté avec l’écrit et le numérique soient discriminés.
Nous demandons aux 7 communes et à toute école de permettre aux parents d’inscrire leurs enfants via un guichet communal ou en se rendant dans l’école de leur premier choix. Si ce contact humain n’est pas garanti, nous nous réservons le droit de mener des actions.
Cependant, nous estimons qu’il faut aller un pas plus loin. Nous ne pouvons pas tolérer que les élèves de milieux populaires aient moins de chances de réussir à l’école que les élèves de milieux favorisés. Nous voulons que tous les efforts soient mis en place pour que chaque enfant ait également accès à une école de qualité et contre la persistance de l’illettrisme dans notre société.
La proposition de solution initiée par l’Aped (Appel pour une école démocratique) et soutenue par de très nombreuses personnalités, associations et syndicats nous semble pertinente: proposer une école à chaque élève, dès le début de sa scolarité, en tenant compte à la fois de la proximité géographique et de la volonté de favoriser la mixité sociale. Autrement dit, chaque établissement serait proposé à des enfants d’origines sociales variées. Les parents qui accepteraient l’école proposée n’auraient plus aucune démarche à effectuer puisque leur enfant serait automatiquement inscrit et qu’ils bénéficieraient ainsi d’une place garantie dans une école socialement mixte. Pour les autres, il suffirait de signaler leur refus aux autorités et ils pourraient alors se mettre à la recherche d’un autre établissement.
LES SIGNATAIRES
Bernard Delvaux, Vincent Dupriez, Éric Mangez, de l’UCLouvain
Amo Rythme
Aped (Appel pour une École démocratique)
CGE — ChanGements pour l’Égalité
La Coalition des parents de milieux populaires et des organisations qui les soutiennent pour changer l’école
La Coordination Des Écoles de Devoirs de Bruxelles
La Fédération des Services Sociaux
Lire et Écrire Bruxelles
Maks asbl
MDS Triangle
SAAMO
Le Syndicat des Locataires
Ligue des Droits de l’enfant