Lettre ouverte au ministre de l’Education nationale

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Monsieur le Ministre, depuis près d’un an, vous entretenez le trouble dans l’opinion publique sur l’apprentissage de la lecture et professez le simplisme pédagogique en la matière. Vos prises de position, souvent caricaturales et aux fondements scientifiques contestés, s’opposent aux contenus même des programmes que vous avez signés…

Paris, le 12 octobre 2006

Monsieur le Ministre,

Depuis près d’un an, vous entretenez le trouble dans l’opinion publique sur l’apprentissage de la lecture et professez le simplisme pédagogique en la matière. Vos prises de position, souvent caricaturales et aux fondements scientifiques contestés, s’opposent aux contenus même des programmes que vous avez signés.

Comment pouvez-vous déclarer en effet que « seule la synthèse (méthode syllabique) doit être employée à l’exclusion de toute autre » alors que les programmes indiquent sans ambiguïté qu’il faut recourir à deux procédures : l’approche synthétique (des lettres vers le mot) et l’approche analytique (du mot vers les lettres) ?

Comment pouvez-vous prétendre, monsieur le ministre, que la méthode syllabique est la meilleure méthode d’apprentissage de la lecture alors que, par le passé, avant même que l’on parle d’approche globale de la lecture, près d’un jeune sur deux sortait de l’école sans aucun diplôme ? Les professeurs de collège se plaignaient à l’époque que leurs élèves savaient déchiffrer mais qu’ils ne comprenaient pas ce qu’ils lisaient. On constate aujourd’hui encore, d’après une enquête INSEE de 2004, que c’est parmi les plus de 55 ans que le pourcentage de personnes ayant des difficultés de lecture est le plus important.

Comment pouvez-vous affirmer que votre démarche s’appuie sur des études scientifiques alors que vous empêchez des chercheurs de s’exprimer et que les soutiens que vous avez évoqués prennent ouvertement leurs distances comme viennent de le faire plusieurs chercheurs en neurosciences lors d’un séminaire du Collège de France en déclarant : « La psychologie cognitive ne prescrit pas de méthode unique d’enseignement » ou encore « les approches synthétique et analytique sont toutes les deux efficaces ?

Monsieur le ministre, vous affichez publiquement des positions qui sont en contradiction avec celles des programmes que vous avez signés.

Vous déformez délibérément les résultats aux différentes évaluations pour pouvoir prétendre que les élèves ne savent plus lire et que l’Ecole est en danger.

Vous écartez des chercheurs reconnus des dispositifs de formation sous prétexte que leur parole n’est pas en conformité avec votre discours.

Vous menacez les enseignants du premier degré d’une enquête pour vérifier s’ils appliquent vos consignes et à l’inverse, vous soutenez officiellement les promoteurs du retour aux méthodes pédagogiques d’il y a un siècle et qui sont en contradiction avec les programmes officiels actuels.

Vous engagez les parents à dénoncer les maîtres qui n’appliqueraient pas une méthode exclusivement syllabique, alors qu’ils n’ont pas les compétences pour identifier la méthode utilisée et que ce n’est pas leur rôle.

Jusqu’où irez-vous monsieur le ministre, dans le dénigrement des enseignants et le mépris des parents ? Jusqu’où ira votre acharnement ?

Parents, nous considérons que la réussite de nos enfants aujourd’hui ne passe pas par le retour aux méthodes du passé. Nous considérons que c’est par le dialogue entre enseignants, parents et responsables de l’Education nationale que le progrès est possible dans le domaine de l’éducation. Nous rejetons toute forme d’autoritarisme.

Enseignants, nous sommes des professionnels. Nous connaissons et respectons les programmes d’enseignement. Nous oeuvrons tous avec détermination et professionnalisme pour conduire le plus grand nombre d’enfants à la maîtrise de la lecture et de l’écriture.

Inspecteurs de l’Education nationale, conseillers pédagogiques et formateurs d’enseignants, nous avons toujours fait en sorte d’aider les enseignants dans leur pratique professionnelle dans le respect de la personnalité de chacun et dans l’intérêt des élèves.

Militants d’associations éducatives, nous savons par notre engagement au côté de l’Ecole que l’apprentissage de la lecture passe par des voies multiples et diversifiées et mérite mieux que les slogans et les simplismes.

La réussite des élèves ne peut se résumer à une affaire de méthode. Au-delà du professionnalisme nécessaire, elle nécessite une relation de coopération et de confiance entre les parents et les enseignants, relation nourrie par le dialogue et que nous nous employons quotidiennement à construire.

Aussi, nous vous demandons, monsieur le ministre, de cesser de caricaturer l’apprentissage de la lecture, de mettre en cause la formation des enseignants et d’entretenir la suspicion au sein de notre système éducatif, car en faisant cela, c’est vous qui mettez l’Ecole en danger.

AFEF – Viviane YOUX, Présidente

AGEEM – Lucille BARBÉRIS, Présidente

AIRDF – Christine BARRÉ DE MINIAC, Présidente

CRAP Cahiers pédagogiques, Dominique GUY, Secrétaire générale

FCPE – Farid HAMANA, Président

GFEN – Odette BASSIS, Présidente

ICEM Pédagogie Freinet – Catherine CHABRUN, Présidente

LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT – Eric FAVEY, Secrétaire national

SI.EN-UNSA – Patrick ROUMAGNAC, Secrétaire général

SE-UNSA – Luc BÉRILLE, Secrétaire général

SGEN-CFDT – Jean-Luc VILLENEUVE, Secrétaire général

SNUIPP-FSU – Gilles MOINDROT, Secrétaire général

SNPI-FSU – Erick PONTAIS, Secrétaire général

2 COMMENTS

  1. > Lettre ouverte au ministre de l’Education nationale
    « Comment pouvez-vous prétendre, monsieur le ministre, que la méthode syllabique est la meilleure méthode d’apprentissage de la lecture alors que, par le passé, avant même que l’on parle d’approche globale de la lecture, près d’un jeune sur deux sortait de l’école sans aucun diplôme ? »
    Ce n’est sans doute pas avec des raisonnements pareils que les auteurs de cette lettre comptent ébranler la politique du ministère.
    Ne pas savoir lire dans tous les sens du terme n’empêche pas aujourd’hui d’obtenir des diplômes et inversement la maîtrise de la lecture ne conduisait pas obligatoirement hier à l’obtention d’un diplôme.

    Ce qui se passe en ce moment autour de la question de la lecture est un cocasse retour de bâton pour ceux qui ont méprisé des années durant les enseignants à l’ancienne. Les nouveaux champions de la liberté pédagogique du maître sont de jeunes convertis, car ils se retrouvent subitement du mauvais côté de la rivière Pédagogie. Mais qu’ils soient sans inquiétude, l’eau qui coule un jour repasse quelques années plus tard par le miracle de l’incompétence.

    Les enseignants dans les classes n’ont que faire des indignations politiques des pédagogues, inspecteurs ou formateurs qui peuvent fort bien renoncer à leurs fonctions d’expertise, démissionner ou retourner dans les écoles. Ils savent depuis longtemps que les chemins pour accéder à la maîtrise de la lecture sont multiples et que les uns n’excluent pas les autres. Ils prennent plaisir à voir éclore des lecteurs sans se laisser détourner de leur mission par les zigzags de la pédagogie officielle.

    Qui demande depuis des années que les parents investissent l’école ? Ceux qui maintenant ont peur que les parents viennent se plaindre de leur pratique pédagogique.
    Qui depuis des années désire que les professeurs des écoles entrent de gré ou de force dans le moule uniforme des IUFM ? Ceux qui maintenant revendiquent la liberté du maître.
    Je ne vois que tartuffes.

    Les pédagogues médiatiques demeureront dans l’ombre les conseillers des ministres, les inspecteurs changeront de discours et les formateurs de théorie. Tous ont l’habitude.

    Les propos provocateurs et populistes du ministre sur l’apprentissage de la lecture tout comme les indignations outrées de ses adversaires électoraux masquent la triste réalité de l’école qui tourne autour de trois mots : informatique, anglais, entreprise ; trois mots qui metttent hélas ministres et pédagogues d’accord malgré les apparentes divergences.
    Quand les publications de certains syndicats fournissent des espaces publicitaires à des assureurs, des banques et des fabricants de colle, on comprend que c’est l’école elle-même qui est à vendre.

    Ne cassez pas l’école…

    Gilles Lehmann, professeur des écoles, au moins si ce n’est pas plus.

    • > Lettre ouverte au ministre de l’Education nationale
      Bonjour j’aurai une lettre ouverte a vous communiquer pour le ministre de l’education enfin plutôt un manifeste je ne sais pas comment le lui envoyer….
      Monsieur
      Je vous prie de bien vouloir prendre connaissance de ce manifeste contre la violence « educative »

      Manifeste contre la violence « éducative »

      La France a signé et ratifié le 7 août 1990 la Convention des droits de l¹enfant. L’article 19 de cette Convention stipule que les États signataires « prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toutes formes de violence, d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales ».

      Or, en France, d¹après un sondage SOFRES de janvier 1999, 80% des parents donnent à leurs enfants gifles et fessées quand ce ne sont pas des coups de martinet ou de ceinture. Presque tout le monde trouve cela normal, inoffensif et même nécessaire. Et les services sociaux et la Justice n¹interviennent que dans les cas extrêmes.

      Pourquoi est-il permis de frapper un enfant alors qu’il est interdit de frapper un homme adulte, une femme, une personne âgée et, en prison, le pire des criminels? Nos lois ne permettraient-elles d¹agresser que les plus faibles?

      Les enfants ont le droit d¹être élevés sans violence, ce qui ne signifie pas sans fermeté.

      De multiples études récentes, dont un rapport de l’OMS de novembre 2002, ont montré que difficultés scolaires, délinquance, violence, dépression, alcoolisme, abus de drogues, maladies diverses et même accidents ont très souvent pour origine des violences, même modérées, subies dans l¹enfance. Maintenant que nous le savons, nous n¹avons plus l¹excuse de l¹ignorance qu¹avaient nos parents.

      Pourquoi s¹étonner que certains jeunes recourent à la violence quand le premier exemple de violence leur a en général été donné par leurs propres parents les frappant sur les joues, le crâne, le dos ou les fesses? L¹enfant frappé apprend à frapper les autres. L’enfant respecté apprend à respecter les autres. Le rôle des parents est-il d¹enseigner la violence ou le respect?

      Les parents qui frappent leurs enfants pour les éduquer le font parce qu¹ils ont été frappés eux-mêmes et ignorent les conséquences de leurs coups. Seule une interdiction sans ambiguïté, comme celle qui, en France, interdit les coups à l¹école depuis le XIXe siècle, peut mettre fin à ce cycle. La France, comme déjà onze pays, dont neuf européens, doit voter une loi spécifique interdisant toute violence, y compris fessées, gifles, tapes, etc. Cette loi doit être assortie non pas de sanctions judiciaires mais d¹une large information apportée aux parents ainsi qu¹aux futurs parents sur les effets des coups et les moyens d¹élever les enfants sans violence, exactement comme il est demandé aux automobilistes d¹être familiers avec le code de la route.

      Les signataires de ce manifeste demandent au gouvernement et à leurs députés de mettre la législation française en harmonie avec la Convention des Droits de l¹Enfant, comme le demande le Comité des Droits de l¹Enfant de l¹ONU, et de voter une loi spécifique qui interdise vraiment toute forme de violence à l¹égard des enfants. Le texte de cette loi pourrait être semblable à celui de la loi danoise : « L’enfant a droit au soin et à la sécurité. Il faut agir de manière respectueuse vis-à-vis de l¹enfant et ne pas lui infliger de punition corporelle ou autre traitement humiliant. »
      ——————————————

      J¹approuve le manifeste ci-dessus. Je vous demande de faire rapidement tout ce qui est en votre pouvoir pour harmoniser notre législation avec la Convention des Droits de l¹Enfant.
      Nom et prénom :Delhomme Violaine
      Adresse : 1 rue désiré lucas bat b 29100 douarnenez
      Signature :delhomme
      J’ai pensé faire un blog (car s’était gratuit et rapide) pour diffuser ce manifeste. Est ce la meilleur façon??

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