A propos du financement de l’enseignement..

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On fait beaucoup de cas pour l’instant des 2,4 milliards dus à la Communauté Française par l’Etat fédéral au détriment de la Communauté Flamande. Cette somme revient à l’enseignement francophone par l’application de la loi spéciale du 16/1/89 qui impose de revoir la clé de répartition de la dotation fédérale aux Communautés à partir de 1999. Cette révision doit se faire en tenant compte du nombre d’élèves dans chaque Communauté sur base de critères objectifs. Quels que soient ces critères, la nouvelle clé sera favorable à la Communauté Française qui ne semble pas disposée à lâcher les 2,4 milliards auxquels elle estime au minimum avoir droit. La Communauté Flamande, elle, n’est pas décidée à se passer facilement de cette somme et propose de compter le nombre d’enfants ce qui lui serait bien plus favorable. Et nous voilà repartis pour une xième querelle communautaire entre les Ministres francophones et flamands du fédéral.

Sur ce point, nous voulons éviter toute ambiguïté sur la position de l’Association que nous représentons. Le comptage des élèves est la seule manière démocratique de répartir les budgets entre les Communautés. La différence entre  » élèves  » et  » enfants  » provient essentiellement du fait qu’il y a plus de jeunes habitants en territoire flamand qui étudient en Communauté Française que l’inverse. Cette Communauté reçoit également plus d’étudiants résidant à l’étranger. La position francophone en matière de clé de répartition est donc correcte. Néanmoins, nous voudrions émettre deux réflexions.

1°) La Communautarisation n’a pas réussi à pacifier le débat communautaire en matière d’enseignement alors que c’était une de ses raisons d’être. Au contraire, si l’enseignement était une matière fédérale, il est évident que la répartition se ferait vers chaque école en tenant compte du nombre d’élèves et pas de l’appartenance linguistique. La Communautarisation est donc plutôt une source supplémentaire de conflit.

2°) Les fameux 2,4 milliards gagnés ou perdus par les Communautés nous semblent être l’arbre qui cache la forêt. En effet, pendant que ce débat s’étale en long et en large dans les journaux, le vrai débat, celui sur le refinancement n’est pas abordé.

La loi de financement qui établit le montant global affecté à l’enseignement par l’Etat fédéral ne tient pas compte de l’évolution du nombre d’étudiants dans le Supérieur. Or, on pouvait parfaitement prévoir (et cela c’est d’ailleurs vérifié) que ce nombre allait augmenter. Aucun mécanisme pour lier cette dotation à l’évolution du PIB n’a été prévu non plus. Cela signifie que notre pays consacre chaque année à l’enseignement, un pourcentage toujours moindre de la richesse produite. Autrement dit, cette loi de financement est en réalité une loi de définancement.

Au début des années 8O, nous consacrions 7 % du PIB aux dépenses d’enseignement. Maintenant, nous en sommes aux alentours de 5,5 %. Ceci représente en chiffres absolus une différence d’à peu près 120 milliards sur base annuelle. Faisons les comptes.

Si on appliquait la nouvelle clé de répartition à la dotation revendiquée par l’APED dans un Mémorandum signé par une soixantaine de personnalités du Nord et du Sud du pays, dont des représentants syndicaux (voir Le Soir du 29/10/98), la Communauté Française gagnerait 54,15 milliards (à comparer aux 2,4) et la Communauté Flamande gagnerait 65,85 milliards (au lieu d’en perdre 2,4). Ceci montre où se trouve l’intérêt des élèves et des enseignants flamands et francophones. Il réside évidemment dans une lutte commune afin d’obtenir des pouvoirs publics plus de moyens pour l’enseignement. C’est tout à fait possible par l’application d’une fiscalité plus juste sur les bénéfices faramineux que réalisent certaines entreprises multinationales. Il ne manque que la volonté politique. En se focalisant sur la clé de répartition sans s’interroger sur la dotation globale, les politiques du Nord et du Sud pratiquent la trop classique méthode du  » diviser pour régner « . Nous appelons les syndicats, les fédérations étudiantes et les fédérations de parents des deux côtés de la frontière linguistique à y résister et à s’unir pour obtenir leur dû commun.