Gand choisit l’école de proximité

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Toutes les écoles fondamentales situées à Gand donneront priorité aux élèves qui habitent le plus près, si la capacité de l’école est insuffisante pour inscrire tous les candidats. Cette décision a été prise le 22 septembre 2008 par l’assemblée générale de la Plateforme de concertation locale (LOP ou Lokaal Overlegplatform), dans laquelle tous les directeurs des écoles sont représentés.

Cette nouvelle réglementation devrait mettre fin aux files d’attente devant les portes de certaines écoles. En prenant en considération le critère de proximité, elle brise dans une certaine mesure le tabou sur la sacro-sainte liberté absolue de choix qui règne dans l’enseignement en Belgique.

Le décret GOK (2002) garantit le droit à l’inscription …

Le gouvernement flamand a instauré en 2002 le décret “GOK” (GOK = gelijke onderwijskansen ou égalité des chances). Ce décret garantit à chaque élève le droit à l’inscription dans une école, s’il remplit les conditions légales (âge, attestation A ou B pour passer à une classe supérieure) et si les parents (ou l’élève qui a plus de 18 ans) souscrivent au projet pédagogique et au règlement de l’école. Un directeur n’a pas le droit de refuser des élèves sur base de leur origine ou de leur conviction religieuse ou philosophique. Il ne peut pas imposer de critères supplémentaires.

… mais ne met pas fin à la ségrégation sociale

Ce décret n’a pas mis fin à la ségrégation sociale dans les écoles flamandes. Il y a dans notre pays un pourcentage important d’écoles à « concentration » de deux types : pauvres et riches. Un pays comme la Finlande, par contre, compte surtout des écoles à grande mixité sociale. Les raisons en sont connues : les élèves vont à l’école de proximité, qui appartient dans 99,5% au même réseau communal et ils suivent essentiellement le même programme jusqu’à l’âge de 16 ans (tronc commun). Le fait que les disparités de revenus et la ségrégation résidentielle (quartiers pauvres et riches) y soient moins importants qu’en Belgique, joue également un rôle.
En Belgique, c’est la liberté absolue de choix qui prévaut. Les parents choisissent une école … pour autant que la capacité de celle-ci soit suffisante et que le directeur ne s’arrange pas pour écarter certains élèves qui ne sont pas souhaités. Dans ce système ultra-libéral, la liberté pour les uns signifie l’exclusion pour d’autres. Les files d’attente de parents devant certaines écoles illustrent l’existence de ce marché scolaire. Médiatisées, elles apparaissent assez gênantes. Quels parents peuvent se permettre de camper devant l’école plusieurs jours et nuits ? Ou se payer un étudiant pour faire la queue à leur place ?

Le ministre de l’enseignement, Frank Vandenbroucke, a donc promis de permettre aux écoles de prendre des mesures pour éviter ces files (camping devant l’école) … Par exemple en instaurant des files « électroniques ».

La transformation du décret GOK rend l’école de proximité possible
En juin 2008, le Parlement flamand a voté une modification du décret « GOK » en permettant aux écoles d’utiliser le critère de proximité (distance entre l’école et l’habitation de l’élève) en cas de manque de capacité. A condition que le LOP (Lokaal Overlegplatform), la plateforme de concertation locale, se prononce dans ce sens.
Le LOP de Gand a voté à une forte majorité l’introduction de ce critère pour les inscriptions des nouveaux élèves dans les écoles fondamentales. Une même proposition n’a pas obtenu la majorité des voix dans le LOP d’Anvers.

A Gand, priorité aux enfants du quartier

Comment vont se dérouler les inscriptions pour les nouveaux élèves dans les écoles fondamentales à Gand ?
En décembre, les frères et sœurs d’élèves peuvent déjà être inscrits. Cette règle de priorité existait déjà avant.
Pendant la période janvier-février, les écoles PEUVENT (mais ce n’est PAS une obligation) donner la priorité aux élèves « GOK », si l’école en a relativement peu ou, vice versa, donner priorité aux élèves « non GOK » si l’école en a relativement peu. Un élève « GOK » est un élève qui répond à un ou plusieurs indicateurs « GOK », notamment : la mère n’a pas de diplôme du secondaire ; la famille vit d’un revenu de sécurité sociale ou a droit à une bourse d’études (revenu modeste) ; l’élève ne parle pas le néerlandais à la maison.
A partir de mars, les écoles peuvent inscrire n’importe quel élève.
Si le nombre de candidats ne dépasse pas la capacité de l’école, tous peuvent être inscrits.

Si, par contre, il y a plus de candidats que des places, le critère qui détermine l’ordre de priorité sera désormais la distance entre l’école et la maison de l’élève (si plusieurs habitent à la même adresse, on tirera au sort).
En janvier (pour les élèves « GOK ») et en mars (pour tous les élèves), la période d’inscription est précédée par deux semaines pendant lesquelles les parents peuvent choisir une ou plusieurs écoles (en précisant clairement leur 1er, 2ème choix)… Un ordinateur central, contrôlé par le LOP, centralise tout. L’ordinateur calcule, sur base du critère de proximité, quels élèves sont admis dans l’école et lesquels sont refusés. Les parents sont immédiatement informés et ont 2 semaines pour utiliser ce droit en inscrivant effectivement leur enfant. L’ordinateur central permet d’éviter les inscriptions « multiples » (vous trouverez tous les détails dans les textes au www.lop.be ).

Les avantages de l’école de proximité

Hormis l’élimination des files d’attente (ou des campements), l’idée de donner priorité à la distance entre l’école et le domicile promeut l’école de quartier. Ses partisans en attendent pas mal d’avantages : une meilleure intégration de l’école dans le quartier, une meilleure intégration, de meilleurs contacts et une meilleure coopération entre les parents qui habitent le quartier, des distances plus courtes pour beaucoup d’élèves et moins de perte de temps pour les parents qui conduisent leurs enfants à l’école.

Dans le texte explicatif qui accompagnait la proposition mise au vote à Anvers, figurent entre autres les arguments suivants pour la priorité aux enfants du quartier : « … ce critère renforce le tissu social du quartier et soutient le développement d’écoles larges : puisque les écoles fondamentales sont aussi un lieu de rencontre pour les enfants et leurs parents ; la projection de la composition sociale du quartier dans la composition sociale de l’école évite l’isolement social et augmente les possibilités de contacts sociaux et d’intégration. Ceci contribue aussi à la réalisation de l’égalité des chances.

A quand des périodes d’inscription obligatoires et des périodes prioritaires pour les élèves GOK au niveau de la communauté ?

Gand est à ce jour la seule région en Flandre où, grâce à l’accord au sein du LOP, toutes les écoles fondamentales appliqueront la règle de priorité aux enfants du quartier en cas de capacité d’accueil insuffisante. Ailleurs, le libre choix de l’école maintiendra la ségrégation sociale en l’état. Les bonnes intentions du décret GOK restent partiellement lettre morte du fait de la liberté d’application de la politique GOK.

La Fédération des associations marocaines (FMV, Federatie Marokkaanse verenigingen) et l’Union des organisations turques (UTV, Unie Turkse verenigingen) proposent certaines mesures dans un mémorandum commun. Elles demandent que toutes les écoles en Flandre utilisent les mêmes périodes d’inscription, afin d’augmenter la transparence pour les parents. Plus important, elles demandent que toutes les écoles soient obligées, pendant une certaine période (par exemple : janvier-février), de donner la priorité aux élèves « GOK » et d’appliquer le critère de proximité au cas où il y trop de candidats.

Ces propositions vont dans le même sens que ce que propose depuis quelques années l’Aped : une carte scolaire socialement corrigée (voir l’article de Nico Hirtt). On pourrait s’imaginer que le LOP propose aux parents une école de proximité (pas nécessairement la plus proche) en veillant à ce que les élèves « GOK » soient répartis parmi les écoles d’une zone et que la mixité sociale soit organisée dans toutes les écoles.

Mais en attendant des règles plus énergiques, nous voulons aussi soutenir les propositions suivantes de la FMV et de l’UTV : « Avant l’année scolaire 2009-2010, il convient d’envisager de fixer de vraies périodes d’inscription, pour toutes les écoles de Flandre. Ces période d’inscription communautaires simplifieront les inscriptions et les rendront plus transparentes, tant pour les parents que pour les écoles. (…) FMV et UTV attendent que toutes les écoles publient leurs périodes d’inscriptions le plus vite possible (…). Il est inadmissible que certaines écoles n’observent pas les accords qui ont été convenus au niveau du LOP ».